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Point sur : saisir le CPH en cas de les Violences Sexistes et Sexuelles au Travail (VSST).

Point sur : saisir le CPH en cas de VSST

Par service juridique

Au sens de l’article L.1411-1 du Code du travail, le conseil des prud’hommes « règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu’ils emploient. ».

La compétence du conseil des prud’hommes étant rattachée à l’existence d’un contrat de travail, cette juridiction ne peut être saisie que des demandes de condamnation et de réparation de faits de harcèlement sexuel ou d’agissement sexiste survenus à l’occasion du travail.

Le phénomène des violences sexistes et sexuelles et au travail (VSST) est susceptible de toucher l’ensemble des travailleurs. Cependant, les femmes en sont très majoritairement victimes.

Dans son rapport de 2024 sur l’état du sexisme en France, le Haut Conseil à l’égalité relève que 37 % des femmes déclarent avoir vécu au moins une situation de non-consentement, et c’est quasiment une femme sur deux chez les 25-49 ans.

Compétence du conseil des prud’hommes en matière de VSST

Dès lors qu’une violence sexiste ou sexuelle est en lien avec le travail, la salariée victime a la possibilité, en cas d’inaction de son employeur, de saisir le conseil de prud’hommes pour faire cesser le comportement fautif. En effet, l’employeur étant tenu par une obligation de sécurité vis-à-vis des salariés, le fait qu’il n’agisse pas pour faire cesser le comportement litigieux engage sa responsabilité devant le conseil des prud’hommes qui peut le condamner à réparer le préjudice subi. A ce titre, l’action est dirigée directement contre l’employeur et non contre l’auteur de la VSST.

Les faits d’outrage sexiste, d’agression sexuelle ou de viol peuvent également être dénoncés devant les juridictions pénales. A noter que le juge pénal est également compétent pour connaitre des situations de harcèlement sexuel. Devant les tribunaux répressifs, c’est le harceleur présumé qui est jugé, alors que devant le conseil des prud’hommes c’est l’employeur qui est jugé au titre d’un manquement à son obligation de sécurité.

Délai pour agir

Dans une situation de violence sexiste ou sexuelle, la  victime dispose de 5 ans pour saisir le Conseil des prud’hommes [1].

Ce délai commence à courir à compter du jour où la titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Dans le cas précis des VSST, le délai court à compter du dernier fait de harcèlement sexuel constaté, ou de l’agissement sexiste (cf. en matière de harcélement moral Cass.soc. 9.06.21, n° 19-21.931).

Déterminer le conseil des prud’hommes compétent

Pour faire cesser le préjudice subit, la victime doit saisir le conseil de prud’hommes qui est compétent territorialement. La répartition de la compétence territoriale des différents conseils des prud’hommes est prévue par le Code du travail.

Au terme de l’article R1412-1 du Code du travail, le conseil de prud’hommes compétent est :
« 1° Soit celui dans le ressort duquel est situé l’établissement où est accompli le travail ;
2° Soit, lorsque le travail est accompli à domicile ou en dehors de toute entreprise ou établissement, celui dans le ressort duquel est situé le domicile du salarié.
Le salarié peut également saisir les conseils de prud’hommes du lieu où l’engagement a été contracté ou celui du lieu où l’employeur est établi
. »

Modalité de saisine du Conseil des prud’hommes

Le Conseil de prud’hommes peut être saisi :

  • Soit par une demande adressée au greffe du Conseil. Cette demande doit être faite sous la forme d’une requête [2] ;
  • Soit par la présentation volontaire des parties devant le bureau de conciliation du Conseil.

Une organisation syndicale représentative dans l’entreprise peut exercer une action en faveur d’une victime de harcèlement sexuel sous réserve de justifier d’un accord écrit de celle-ci [3].

Preuve à apporter par la victime

Lorsque la salariée est victime de harcèlement sexuel, le Code du travail prévoit un partage de la charge de la preuve entre la salariée et l’employeur.

  • Premier temps : la salariée doit présenter des éléments de fait qui laissent supposer l’existence d’un harcèlement sexuel ; éléments de fait qui doivent être précis et concordants.
  • Deuxième temps : une fois que la salariée a présenté ces éléments de faits, le juge doit les prendre en compte dans leur ensemble et apprécier s’ils laissent présumer un harcèlement sexuel.
  • Troisième temps : si ces éléments laissent bien présumer un harcèlement sexuel, c’est alors à l’employeur d’apporter la preuve contraire, c’est-à-dire de démontrer que ces faits peuvent s’expliquer par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement sexuel.

Cet aménagement de la charge de la preuve en cas de harcèlement sexuel ne s’applique pas en cas d’action aux prud’hommes visant à dénoncer des agissements sexistes. La victime devra apporter elle-même la preuve de l’agissement sexiste.

Sanctions devant le conseil des prud’hommes

Lorsque le harcèlement sexuel est retenu par les juges, la victime peut obtenir :

  • L’indemnisation de son préjudice en raison du manquement par l’employeur à son obligation de sécurité vis-à-vis de l’ensemble des salariés.
  • La nullité de son licenciement lorsque celui-ci a pour origine une situation de harcèlement sexuel qu’a subi ou refusé de subir la victime.

Lorsqu’une situation d’agissement sexiste est retenue par les juges, l’employeur peut être condamné à indemniser le préjudice subi par la salariée sur le fondement de son obligation de sécurité.

L’employeur doit également user de son pouvoir disciplinaire pour sanctionner l’auteur de harcèlement sexuel ou d’un agissement sexiste.